Mes 3 bonnes pratiques de commentateur sportif

Journaliste sportif, c’est le métier passion par excellence, le job qui fait rêver 99 % des amateurs sportifs. Surtout ceux qui n’avaient pas le niveau pour être les acteurs sur le terrain ! Alors commentateur sportif, c’est une sorte de Graal, l’aristocratie du journalisme sportif, celui qui fait vivre l’évènement, vibre avec les téléspectateurs et auditeurs, délivre plus que de l’information : celui qui partage les émotions. C’est la bande-son du sport à la télévision ou à la radio.

Un exercice journalistique à part

Le journalisme sportif, c’était mon rêve depuis l’adolescence et j’y suis entré dès mes 18 ans par la petite porte, comme correspondant de presse puis journaliste stagiaire, et enfin journaliste titulaire en presse quotidienne régionale. Je l’ai exercé sous différents angles, de la course pédestre locale au match de l’équipe de France de football en passant par l’épreuve du Tour de France cycliste, les jeux Olympiques ou le championnat de France d’aérobic. J’ai effectué des reportages sur le terrain dès 6 heures du matin et du « desk » derrière mon bureau jusqu’au bouclage au milieu de la nuit. Puis un jour s’est présenté l’opportunité de commenter des matchs de basket pour une radio locale, et même d’exercer sur des matchs télévisés par la suite. J’ai aussi connu l’exercice du « fil rouge » lors de multiplex omnisport à la radio.

Je n’ai pas le background ni l’exposition des ténors de la profession visibles sur les grandes chaînes nationales. Mais avec une décennie de recul et environ 500 matchs commentés, j’ai pu évoluer dans mon approche du commentaire sportif dans le but constant de m’améliorer et d’offrir la meilleure expérience aux auditeurs et téléspectateurs. Voici les 3 enseignements que j’en tire, les 3 points essentiels auxquels un commentateur sportif doit prêter attention.

1. Travailler son match en amont

C’est une évidence, mais j’ai vécu côté spectateur la frustration d’écouter des commentateurs sportifs manquer d’éléments sur l’évènement qu’ils retransmettaient. Je ne parlerai pas ici du défaut de connaissance de la discipline, de son règlement et de son histoire – quoique c’est évidemment problématique lorsque cela se remarque. Je parle de l’évènement, l’affiche entre deux équipes dans le cas d’un match de football ou de basket par exemple. À l’instar d’un formateur qui prépare sa session, le commentateur sportif doit consacrer plus de temps à la préparation de son match que la durée effective de la rencontre le jour J ! On peut avoir en tête la majorité des éléments lorsqu’on suit l’actualité de manière assidue, mais une préparation rigoureuse permet de disposer d’informations précises et actualisées qui vont enrichir le commentaire, apporter des données pertinentes pour le spectateur. Le commentateur sportif reste avant tout un journaliste, dont la vocation est d’informer.

Sur un évènement sportif, le travail en amont va concerner notamment deux dimensions :

  • Les acteurs : clubs (historique, palmarès), équipes (effectifs, transferts), joueurs/athlètes (carrières, caractéristiques). C’est une mine d’or d’informations et d’anecdotes qui permet de donner de l’épaisseur au commentaire, apporter à la fois de l’humain et des références qui vont générer de l’attachement et donc capter davantage l’attention des spectateurs.
  • Le contexte : enjeu du match, résultats/classement, actualités récentes, déclarations d’avant match, rivalité entre clubs ou joueurs, etc. Le commentateur sportif doit fournir toutes les clés de compréhension au spectateur pour qu’il vive l’évènement en ayant conscience de son importance.

Un joueur qui bat son record en carrière, une équipe qui se bat pour récupérer le point average malgré une victoire déjà acquise, un stade qui siffle ou applaudit un joueur de manière décorrélée de sa performance sur la rencontre… Certains enjeux et comportements ont une explication qu’un commentateur sportif doit être en mesure de livrer aux spectateurs. À bon escient de préférence : réciter sa leçon et « tout envoyer » d’une seule traite pour montrer qu’on a bien fait son travail n’est pas la meilleure des manières d’amener l’information.

2. Moduler sa voix en fonction de l’instant

Commenter un évènement sportif en intégralité, c’est 1h30 à 2 heures en tête à tête avec les spectateurs. Le but, c’est de les accompagner aussi bien par de l’information que de l’émotion, l’essence même du sport – et plus encore du sport spectacle. Le risque, c’est de les faire fuir en devenant une nuisance dans leur expérience derrière leur radio ou devant leur écran. L’idée n’est pas d’uniformiser la voix et le ton – chaque commentateur sportif possède sa signature vocale. Mon conseil porte plutôt sur la réflexion à avoir sur sa manière de commenter pour se mettre au service de l’évènement.

En premier lieu, le sport spectacle suppose une atmosphère festive ; le spectateur doit humer l’air des grands soirs dans la voix du commentateur sportif. Cela doit se traduire par de l’intensité et du dynamisme pour entraîner le spectateur dans l’évènement. un moyen de le « happer », de capter son intérêt pour lui passer l’envie de zapper ou scroller sur son smartphone. Le premier exercice va donc consister à élever la voix, relancer régulièrement avec de manière enjouée. Pour cela, mieux vaut être en forme physique et psychique, car le commentaire sportif est gourmand en énergie ! Mais le commentateur marche sur une ligne de crête ; il ne doit pas surjouer au risque d’agacer. La voix doit en effet respecter une forme de cohérence avec l’instant. Un fort débit sur une séquence anodine – une balle qui file en touche, des lancers francs en milieu de deuxième quart-temps – sera agaçant, et cela empêchera de sacraliser les vrais instants clés de la rencontre, ceux qui nécessitent les plus belles envolées pour marquer l’importance d’une action dans le sort du match.

C’est là aussi où la parfaite connaissance de l’enjeu est nécessaire chez le commentateur sportif, ainsi que la maîtrise de la discipline et de ses subtilités. Ce bagage est indispensable pour pouvoir mettre en évidence les moments clés et y réserver ses meilleures saillies verbales.

Le risque de nuisance peut se nicher à plusieurs niveaux. Une voix monotone ou à l’inverse trop enjouée en permanence peut très vite devenir désagréable. C’est pourquoi il est nécessaire de moduler son débit et son intensité vocale en fonction de l’action. Faire retomber la pression après une séquence importante, monter crescendo lors de la construction d’une action… C’est ici que le commentaire sportif doit s’approche d’une certaine musicalité, pour délivrer des émotions aux moments opportuns tout en ménageant des instants de repos.

L’alternance « infos » et « live » permet aussi de rythmer la retransmission sportive, en profitant des temps faibles pour apporter des données et en se concentrant sur le direct lorsque l’action bat son plein. Ne pas respecter cet ordre logique, c’est risquer de livrer une anecdote sur une action décisive. L’image qui tournera en boucle sur les réseaux sociaux contiendra non pas le commentaire du geste fabuleux, mais un bout d’anecdote totalement décorrélé de l’action… Pas idéal pour faire le buzz sur Instagram et TikTok.

Avec l’émergence des réseaux sociaux qui sortent des séquences du direct pour relayer ces moments qui resteront, le commentateur sportif a développé une nouvelle pratique : la punchline préparée en amont, pour immortaliser l’instant. Une manière rassurante de préparer le terrain au lieu de s’en remettre exclusivement à son sens de l’improvisation. Je n’ai pas de « religion » sur cette méthode ; je n’y suis pas opposé dès lors que le propos ne désamorce pas l’émotion de l’instant.

3. Adapter son positionnement et son champ lexical à son public

Commenter un match c’est souvent un plaisir personnel pour un journaliste sportif qui exerce par passion. Mais ça ne doit pas se résumer à cela, au détriment du public auquel il s’adresse. Comme pour tout exercice journalistique, il doit s’inscrire dans la charte éditoriale de son média, c’est-à-dire suivre une ligne directrice intimement liée aux attentes son audience. Concrètement, le commentateur sportif d’un média local aura forcément un biais lorsque évolue un athlète ou une équipe régionale face à un adversaire « d’ailleurs », de la même manière qu’un média national sera engagé émotionnellement derrière ses représentants dans une compétition internationale. Il aura un regard plus aiguisé sur le comportement et les performances des acteurs les plus proches de son audience. Mais cet angle ne doit pas le faire chavirer vers un chauvinisme à tout crin, celui qui fait perdre la raison. La subjectivité n’autorise pas tout, c’est une question d’éthique – et le sport a besoin d’éthique pour préserver ses valeurs d’universalité. D’autant qu’à l’ère des réseaux sociaux, une séquence de parti pris excessif aura vite fait de provoquer un bad buzz.

Outre l’angle, le commentateur sportif doit adapter son ton au positionnement de son média. Il peut lui dicter une forme de neutralité – typiquement pour un média national dans le cadre d’un évènement sportif national –, mais aussi un traitement expert ou plus pédagogique. Les médias sportifs qui s’adressent aux spectateurs les plus mordus auront besoin de commentateurs pointus dans leur analyse pour satisfaire la demande d’expertise de leur audience. Pour un média généraliste – l’audiovisuel public par exemple –, l’audience plus éclectique va dicter une approche plus didactique, sur l’analyse technique comme sur le contexte et les acteurs afin de fournir des éléments plus généraux. Cela va se traduire dans le champ lexical : abreuver un public peu expert de jargon ultra-pointu n’a aucune utilité – sauf à l’expliciter clairement. Et même auprès d’une audience très connaisseuse, un commentateur sportif gagnera à « fleurir » son champ lexical pour créer davantage de complicité avec elle, à la manière d’un Jacques Monclar réputé pour sa capacité à dégainer des métaphores imagées plutôt que d’aligner les termes techniques.

En termes de champ lexical, le commentateur sportif doit en effet se méfier d’un autre travers : les poncifs. Des expressions toutes faites, resservies à l’envi sans grande originalité. Inutile de donner des exemples, tout le monde les a écoutés et réécoutés !

Voici mon « retour d’expérience » de commentateur sportif. Il ne s’agit en aucun cas d’un guide mais de réflexions qui m’ont parcouru au fil de mes années micro casque sur le crâne, mais aussi d’observation attentive en tant que spectateur de sport à la radio et à la télévision. Le commentaire sportif est une expérience exceptionnelle à vivre, mais aussi une responsabilité qui oblige à un travail sur la forme et le fond pour se montrer à la hauteur de ce rôle de passeur d’émotions.

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L'auteur

Fabien Zaghini
Je m'appelle Fabien Zaghini et je suis freelance en marketing digital. Tendances SEO & SMO, best practice rédactionnelles, prises de parole : ce blog est mon espace d'expression autour de mon métier et des sujets qui me tiennent à coeur.